L’If

L’If

L’If commun (Taxus baccata) fait partie de la famille des conifères. D’une longévité surprenante, il pousse très lentement et a, comme tous les arbres, de nombreuses cordes à son arc… Et ce n’est  rien de le dire car le plus beau de ses atouts est sans aucun doute son bois, plus connu sous le nom de « bois d’arc » !
En effet, les fibres du bois d’if sont la parfaite combinaison entre résistance et flexibilité : les deux qualités requises pour la facture d’arc. En Europe, c’est le meilleur bois dont puisse rêver le facteur d’arcs, bien qu’il y ait de sérieux concurrents outre Atlantique comme l’Hickory ou l’Osage. Le bois dur de l’If est jaune doré tandis que l’aubier est pourpre cuivré, ainsi quand on coupe une branche ou un tronc, on peut observer ces deux couleurs. Par ailleurs ce bois de grande qualité et étonnement coloré fut et est encore utilisé en marqueterie ou en ébénisterie.

          On ne l’aperçoit que très peu dans les haies, bois et à l’état sauvage, mais il orne souvent les cimetières et lieux de culte. Oui car depuis des siècles l’If est symbole de mort… Pouvant atteindre les quelques milliers d’années d’âge, l’If était perçu comme un éloge à la prospérité, à la longévité, et faisait selon de nombreux peuples le lien entre les morts et les vivants. Mais ce symbole mortel lui vient aussi de sa toxicité ! En effet, une autre des particularités de l’If est que ses racines sont toxiques, ainsi que sa sève, ses feuilles et le noyau de ses baies ! Selon certains auteurs, la toxine de l’If était déjà utilisée lors de la Préhistoire pour imprégner les flèches de poison. Seule la chair rouge et gélatineuse des baies est comestible, ce qui est en réalité une ruse destinée à sa reproduction. L’arbre se reproduit par « endozoochorie » : cela signifie que la propagation des graines se fait par ingestion par des animaux. Comme les noyaux sont toxiques ou du moins in-digérables pour l’organisme des animaux (oiseaux surtout) qui le mangent, ils sont restitués par les fientes ou excréments ! Ainsi la graine donnera naissance à un nouvel individu là où la crotte aura atterri !

S’il est laissé libre de taille et qu’il n’est pas gêné par l’ombre d’un autre arbre pendant sa croissance, il prendra volontiers une allure en « flamme de bougie », sorte de gros buisson avec plusieurs branches charpentières démarrant presque du sol. L’If se prête également très bien à l’art de la taille en topiaire. Dans ce cadre il est souvent utilisé en cône ou en carré et orne ainsi de nombreux et prestigieux jardins à la française.

          Sous l’If, peu d’autres végétaux ont la chance de pousser… Le feuillage de l’arbre étant très dense, ni les rayons du soleil ni la pluie ne passent aisément au travers. Or peu de plantes peuvent se vanter de vivre au sec et sans lumière ! Ainsi, le sol sous l’If est souvent à nu ou simplement couvert de lierre rampant et de braves herbacées isolées. Autrefois, l’Europe et y compris la France comptait de grandes forêts d’Ifs, mais celles-ci ont disparu : soit arrachées car jugées toxiques pour le bétail, soit coupées pour en récupérer le bois et ainsi fabriquer des arcs. Les Grecs, comme les Gaulois ou encore les anglais lors de la guerre de cent ans ont largement profité de cette arme redoutable qui a permis à de nombreuses armées de triompher avec leurs flèches !